La fiabilité d'une mesure réalisée sur le terrain repose, d'une manière générale, sur deux facteurs : la fidélité et la validité. Pour être fidèle, la mesure doit être à la fois la plus objective et la plus reproductible possible. En d'autres termes, la mesure doit pouvoir être faite par n'importe qui et à n'importe quel moment sans que cela ne nuise à la valeur enregistrée.
De multiples facteurs peuvent influencer la FC. On les divise généralement en deux catégories : les facteurs intrinsèques et les facteurs extrinsèques. Les premiers concernent uniquement la façon dont le coeur est stimulé par ses propres cellules nerveuses situées dans ses parois. Les variations qui pourraient subvenir à ce niveau relèvent du domaine médical et sont généralement le fait d'anomalies du rythme cardiaque. Ils ne seront pas abordés ici. Par contre, il est important de savoir quels sont les facteurs extrinsèques qui peuvent induire des variations de FC lors de sa mesure. Cette importance est plus évidente encore si l'on décide d'utiliser la FC comme paramètre de suivi ou de contrôle de l'entraînement comme nous le verrons dans la partie utilisation..
Les facteurs extrinsèques regroupent des influences de plusieurs ordres : nerveuse, hormonale, environnementale, chimique, etc. La gande majorité des influences est le fait de l'innervation que reçoit le coeur, ainsi qu'à certaines substances chimiques circulant dans le sang. Elles sont regroupées sous le terme de contrôle extrinsèque de la FC. Dans les cas les plus extrêmes, ce contrôle peut abaisser la FC à 30 bpm au repos ou la faire monter jusqu'à 210 bpm au cours d'un exercice maximal. Ces contrôles extrinsèques peuvent même avoir un rôle à jouer avant même que l'exercice ne commence, comme nous le verrons plus loin.
Elle se manifeste par l'intermédiaire de l'innervation que le coeur
reçoit du système nerveux autonome (sympathique et parasympathique).
L'effet sympathique est cardio-accélérateur
(catécholamines : noradrénaline et adrénaline) alors que
celui du parasympathique est cardio-modérateur
(acétylcholine). Ainsi, au repos, le coeur est sous l'influence du système
parasympathique.
D'autres nerfs arrivent du centre cardio-vasculaire du tronc cérébral
qui gèrent les afférences issues des récepteurs périphériques
contrôlant la pression sanguine (barorécepteurs). Lorsque la pression
augmente, les parois des vaisseaux s'étirent, les barorécepteurs
sont stimulés et, par voie réflexe, il y a diminution de la FC
et vasodilatation périphérique pour que le débit sanguin
reste constant. Mais ces mêmes mécanismes peuvent être utilisés
pour augmenter le débit cardiaque. c'est ce qui se passent durant l'exercice
physique. Les barorécepteurs empêcheraient d'atteindre une trop
grande pression sanguine lors d'un exercice, pression qui pourrait nuire à
certains organes puisque, en circulant trop vite, le sang ne peut apporter les
substances dont ils ont besoin pour fonctionner.
Puisque les parois des vaisseaux sanguins contiennent des barorécepteurs,
on pourrait penser qu'en prenant le pouls, la pression que l'on exerce avec
les doigts sur une artère stimulerait ces récepteurs (hausse de
pression) et que la FC s'en trouverait diminuée. Des travaux ont montré
que ce n'était pas le cas. La palpation d'une artère (carotide
ou radiale) pour prendre le pouls n'a aucune influence sur la FC quel que soit
le moment où l'on décide de faire cette palpation (repos, exercice,
récupération) (Couldry et coll. 1982 ; Gardner et coll. 1979 ;
Oldridge et coll. 1981 ; Sedlock et coll. 1983). Cette méthode de terrain
est donc tout à fait appropriée pour mesurer la FC.
Le centre cardio-vasculaire du tronc cérébral est directement
sous l'influence corticale. Par conséquent, toute variation de l'état
émotionnel du sujet peut modifier de façon plus ou moins importante
les ajustements cardio-vasculaire, masquant ainsi les valeurs "réelles"
de la FC et de la pression sanguine au repos. Avant même le début
de l'exercice physique, on note une augmentation de la FC, probablement le résultat
d'une activation sympathique et d'une modération parasympathique liée
à l'activité corticale de préparation à l'exercice.
Ceci fut démontré par une étude de McArdle et coll. (1967)
où la FC fut mesurée par télémétrie chez
des coureurs entraînés et non entraînés durant trois
périodes différentes : au repos, au moment du départ et
pendant la course, sur des distances allant de 50 à 3200 m.
Nb sujets | Repos | Avant | Course | |||||
Discipline | E | N | E | N | E | N | E | N |
50 m | 5 | 4 | 67 | 69 | 148 | 124 | 177 | 162 |
200 m | 5 | 4 | 67 | 67 | 130 | 115 | 191 | 186 |
400 m | 4 | 4 | 63 | 68 | 129 | 118 | 187 | 189 |
800 m | 4 | 4 | 62 | 70 | 122 | 129 | 186 | 194 |
1600 m | 4 | 4 | 58 | 64 | 118 | 128 | 195 | 198 |
3200 m | 4 | 4 | 59 | 74 | 108 | 109 | 206 | 199 |
Il y est intéressant de noter ici que l'ajustement de la FC est spécifique à la distance à parcourir : plus cette distance est courte, plus la FC est élevée avant le départ. Ce mécanisme permettrait de mobiliser plus rapidement les réserves énergétiques afin de réaliser la meilleure performance possible. On peut s'interroger sur l'intérêt d'un tel mécanisme pour les courses de longue durée même si celui-ci est beaucoup plus faible. Petro et coll. (1970) ont avancé l'hypothèse que des récepteurs proprioceptifs seraient à l'origine de l'accélération de la FC avant le début de l'exercice. Mais cela ne diminue en rien n'importance de l'influence corticale sur le contrôle de la FC (Perski et coll. 1985).
L'entraînement y va aussi de son influence sur la FC en installant un
déséquilibre entre les deux protagonistes du système nerveux
autonome. Une augmentation de l'activité parasympathique (cardio-modératrice)
serait liée à une diminution de l'activité sympathique
(cardio-accélératrice). Elles auraient pour effet une bradycardie,
qualifiée de "normale" dans le cadre d'une pratique sportive
(Scheuer et Tipton 1977).
L'entraînement pourrait induire une augmentation de la sensibilité
du noeud sinus-atrial à l'acétylcholine, neurotransmetteur du
système parasympathique connue pour ralentir le rythme cardiaque (Bolter
et coll. 1973). La résultante de cet effet est l'augmentation de ce que
l'on appelle la réserve cardiaque (FC max - FC repos) et donc,
pour tout exercice sous-maximal, une économie substantielle du travail
cardiaque (pour une même intensité d'exercice, la FC est plus basse
après un entraînement) (Chignon et coll. 1971 ; Clausen 1977 ;
Cunningham et Hil 1975 ; Ekblom et coll. 1968 ; Ekelund 1967 ; Flandrois et
Lacour 1975 ; Gruzca et coll. 1989 ; Katona et coll. 1982 ; Kreminski et coll.
1991 ; McArdle et coll. 1973 ; McArdle et coll. 1978 ; Spina et col. 1992).
Cette aptitude de l'entraînement à influencer le contrôle
périphérique de la FC est une piste actuellement explorée
pour permettre le suivi de l'entraînement. Nous l'exposons dans la partie
consacrée à l'utilisation de la FC à cette fin.
On peut citer d'autres facteurs extrinsèques :